Écouter le podcast ci-dessous
Extraits
Ngaye Mékhé est la capitale de l’artisanat du Sénégal. Pour preuve, en 2014, la première Journée de l’artisanat du Sénégal s’est déroulée dans la commune sous la présidence de Macky Sall. Quelle est l’origine du dynamisme de l’artisanat à Mékhé ?
Permettez-moi de remonter à l’histoire et la sociologie pour vous dire que n’eût été l’existence du royaume du Cayor, il n’y aurait pas d’artisanat à Mékhé. Le royaume du Cayor, qui a été fondé en 1545, a été un royaume très riche après avoir été un État vassal du royaume du Djolof. Là où il y a eu de grands royaumes, il y a eu beaucoup d’artisans notamment dans la forge, la broderie ou la maroquinerie pour habiller les rois. Mékhé a toujours été le centre commercial du royaume du Cayor. A la disparition de celui-ci, les artisans ont migré vers la zone économique et commerciale que constituait Mékhé. C’est normal que tous, à partir de 1886-1887 jusqu’à 1890, ont migré pour s’installer là où il y avait l’économie. C’est ce qui fait que Ngaye Mékhé est devenu au fil du temps un centre important de l’artisanat et, par la force des choses, la capitale sénégalaise de l’artisanat.
Mékhé a toujours été le centre commercial du royaume du Cayor. A la disparition de celui-ci, les artisans ont migré vers la zone économique et commerciale que constituait Mékhé
2014 est aussi l’année où vous avez été élu maire. L’organisation de la Journée de l’artisanat dans votre commune est-elle la raison pour laquelle vous avez décidé de créer un cluster de l’artisanat à Mékhé ?
Non, pas du tout. Je suis un Mékhois dans l’âme. Ce n’est pas rien que j’ai décidé de rentrer à quatre ans de ma retraite pour me consacrer au développement de la ville en apportant les acquis accumulés au fil du temps à travers le globe. J’ai quitté la Banque africaine de développement le 28 mars 2014 pour me présenter aux élections locales du 29 juin 2014. Et Dieu merci, j’ai été élu. Si je n’avais pas pied à Mékhé, si je n’avais pas une emprise dans la ville, peut-être que je n’aurais pas été élu.
Le 22 décembre 2014, le chef de l’Etat, Son Excellence Monsieur le Président Macky Sall, a choisi d’organiser la Journée nationale de l’artisanat à Ngaye Mékhé. De ce jour, il a décrété dans son discours que Ngaye était devenue la capitale de l’artisanat. Nous avons essayé de matérialiser cette vision, de travailler à ce que Mékhé consolide ses acquis. Ce sont des acquis qui sont centenaires. Etant né là et ayant vu le développement de l’artisanat, dans ma vision, il était bon d’avoir une feuille de route qui tienne compte de ces réalités pour que Mékhé devienne véritablement un cluster de l’artisanat avec comme point essentiel la chaîne de valeur sur le cuir.
Quels sont les défis de développer cette chaîne de valeur du cuir ?
A Ngaye Mékhé, nous avons plus de 250 ateliers qui sont dans les peaux et cuirs, de la tannerie des femmes maures aux ateliers de production de chaussures. Dans chaque atelier, il y a à peu près quatre artisans qui y travaillent. Chaque atelier produit en moyenne 10 à 20 paires de chaussures par jour. Quand ils ont du matériel, chaque artisan peut produire dix paires de chaussures. Chaque chaussure est vendue entre 1.500 et 65.000 francs. Sur les 250 ateliers produisant 10 paires de chaussures par jour, si nous avons une moyenne de 6.500 francs par paire, cela peut faire un chiffre d’affaires de plus de 9 milliards de francs CFA. C’est important économiquement. Pour bâtir autour de cette chaîne de valeur, il faudrait qu’il y ait l’approvisionnement correct en peaux et leur traitement correct. Il faudrait qu’il y ait des outils de production, que l’on puisse avoir un lieu où on peut faire le marketing de ces produits et avoir une ouverture sur le marché national et sur le marché international.
A Ngaye Mékhé, nous avons plus de 250 ateliers qui sont dans les peaux et cuirs, de la tannerie des femmes maures aux ateliers de production de chaussures
Nous travaillons autour de cette chaîne de valeur. Nous sommes en train de consolider la tannerie des femmes maures. Nous avons une nouvelle usine de maroquinerie installée. Nous avons plus d’une vingtaine de jeunes formés en maroquinerie en Italie et qui sont capables de produire tout ce qui est produit par Lancel, Dior, Gucci ou autres. Il nous reste à insister sur la qualité et le label. Ce que nous voulons, c’est montrer que nous devons servir d’exemple. Mékhé a les moyens et les atouts. Il nous reste l’accompagnement de l’Etat.
Quels sont ces atouts?
Mékhé est l’une des seules villes à avoir conservé intacte sa gare qui est utilisée aujourd’hui avec l’exploitation de la mine de zircon
Nous sommes la capitale de l’artisanat, c’est incontournable. Mékhé est l’une des seules villes à avoir conservé intacte sa gare qui est utilisée aujourd’hui avec l’exploitation de la mine de zircon. Nous espérons que pour des besoins de développement économique national, nous pourrons avoir une déviation sur 4 kilomètres pour avoir une zone intercommunale qui sera la zone économique spéciale du Cayor que nous pilotons en tant que leader pour associer les autres maires. Ce sera une zone économique avec un port sec dans la mesure où nous avons une position géographique stratégique unique : ouverture sur Touba, la deuxième ville économique du pays à 110km, ouverture sur le bassin arachidier, Bambey, Fatick et Kaolack, ouverture sur l’océan à 20 km et Mékhé est installé au beau milieu de l’axe Dakar – Saint-Louis.
Crédit photo: DakarActu
Add Comment