Madiop Guèye, Économiste: « A Richard-Toll, il y a une méfiance de la population envers les structures sanitaires à cause du risque de contamination »

Les entretiens de WATHI – Les régions du Sénégal – Série Covid-19 – Focus Saint-Louis

Madiop Guèye

Madiop Guèye est doctorant en Economie et travaille à l’Agence nationale de la statistique et de la démographie (ANSD). Il est basé à Richard-Toll. 

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Extraits

Sur le plan sanitaire, il faut dire que les services dédiés à ce secteur sont vraiment en alerte et restent disponibles dans la prise en charge rapide des malades présentant des symptômes. Cependant, il faut relever une certaine méfiance de la population envers les structures sanitaires à cause du risque de contamination (du Covid-19). Les populations préfèrent souvent les officines de pharmacie pour y trouver des calmants en attendant la fin de la crise. De manière générale, on constate de moins en moins de patients dans les structures sanitaires.

Il est relevé une très bonne collaboration entre les services déconcentrés de l’État et les autorités administratives sous la coordination du préfet et du sous-préfet. Dans ce sillage, il faut dire que des opérations de désinfection et de désinsectisation de tous les quartiers ont été menées par la subdivision du service d’hygiène de Richard-Toll. La sensibilisation a été également effectuée dans tous les quartiers de la ville, dans les villages environnants ainsi que dans les autres communes telle que la commune de Ndombo Sandjiry ou la communauté rurale de Mbane.

Par ailleurs, il faut dire que les services de sécurité veillent de manière permanente même s’ils respectent strictement des décisions qui ont été prises au niveau central pour contrer la pandémie du Covid-19. De plus, des lave-mains ont été mis à la disposition des populations dans les lieux publics. Par exemple, dans la commune de Ndombo Sandjiry, c’est ce qui est relevé ainsi que dans d’autres coins de la ville de Richard-Toll.

La sensibilisation, la désinfection, le respect du couvre-feu ainsi que l’interdiction du transport interurbain ont été vraiment capitaux dans la lutte contre la propagation du Covid-19. En plus, la prise en charge par l’État des factures d’eau et d’électricité de la tranche sociale vulnérable devra permettre de soulager les dépenses des ménages. Cependant, nous pensons que ce n’était pas nécessaire de fermer les marchés ou d’interdire certains rassemblements, il faudrait plutôt les réglementer en demandant par exemple aux populations de porter des masques etc.

Les populations préfèrent souvent les officines de pharmacie pour y trouver des calmants en attendant la fin de la crise

Les populations continuent à s’adonner à leurs activités traditionnelles telles que l’agriculture, l’élevage. Ceux ce qui travaillent à la Compagnie Sucrière Sénégalaise (CSS) continuent toujours à vaquer à leurs préoccupations. Toutefois, ces activités restent limitées par l’interdiction de rassemblements et du couvre-feu et les impacts du couvre-feu. Cependant, certains travailleurs tels que les mécaniciens, les commerçants, les couturiers se retrouvent en situation de chômage technique.

Concernant l’agriculture, je pense qu’il faut dire que la production est moins touchée car les heures de travail des paysans ne chevauchent pas avec les heures dédiées au couvre-feu. Toutefois, le secteur agricole est vraiment confronté à un problème d’écoulement de la production avec la fermeture de certains marchés et les difficultés liées au transport pour joindre d’autres (marchés). Relativement au commerce, il faut dire que les opérations de déguerpissement gangrènent vraiment le fonctionnement du petit commerce et, par ricochet, le secteur informel de manière générale dont bon nombre de ménages dépendent.

L’élevage reste moins touché par la crise au même titre que l’industrie (Dolima, CSS) qui aurait bénéficié de la fermeture des frontières pour accroitre ses ventes nationales

Pour ce qui est de l’artisanat, ce sont essentiellement les mécaniciens, les menuisiers que ce soit métalliques, en aluminium ou en bois, les couturiers qui forment essentiellement ce secteur. Lequel secteur est presque au point mort car les mécaniciens avancent qu’il n’y a plus de réparation de véhicules parce que celles-ci ne roulent pas. Au même moment, les couturiers restent handicapés par l’interdiction des cérémonies ; les populations ne sortent plus donc elles n’ont plus besoin de se faire confectionner des habits.

L’élevage reste moins touché par la crise au même titre que l’industrie (Dolima, Compagnie sucrière du Sénégal) qui aurait bénéficié de la fermeture des frontières pour accroitre ses ventes nationales. Enfin, il faut dire que l’annulation des Gamous (cérémonies religieuses) tels que le Gamou de Ndombo Alarba, le Gamou de Thiago, le Gamou de Mbilor, le Gamou de Ndiawo ainsi que la fermeture des mosquées et églises constituent essentiellement les effets saillants de la crise sur le secteur culturel.

L’aide alimentaire n’est toujours pas disponible à l’heure actuelle. Par rapport à ce qui est annoncé par l’État, une enveloppe financière devrait permettre de combler davantage les besoins des ménages. Si les populations ont du riz, de l’huile et autres, il faudra accompagner cela avec une aide financière pour pouvoir accéder à des produits nécessaires pour la cuisson. En outre, il faut dire que l’État doit aussi réviser sa politique fiscale pour soutenir le secteur privé et chercher surtout à juguler les conséquences néfastes sur certains secteurs tels que le transport et le commerce qui, visiblement, en souffrent le plus dans la commune de Richard-Toll et ses environs.

 


Source photo : Watu Digital Lab

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